RELIANCE COACHING Conscience et éveil de soi

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Double sentence

Comme tous les jours, tu descends âprement les marches dont tu intercales le mouvement de soupirs qui prédisent ton état d’esprit et l’état de ton cœur. Coupée du Souffle de la vie par ce que je suis devenu.

 

Maladie.

 

Un amas de chair à travers lequel tu ne vois que dislocation, engourdissement, lenteur, faiblesse, sidération, hébétement, empêchement.

 

HONTE.

 

Les mots, que je voudrais tant te dire dans ces moments où ton regard se fait amer et tranchant, se cabrent, se ruent les uns sur les autres et finissent par s’étrangler dans un engorgement d’une puissance infinie.

 

Tu entres dans ce coin de cuisine que tu affectionnais tellement auparavant. Un coin conçu pour rassembler, accueillir, recevoir, échanger, partager, rire, dire, se dire, nourrir, se nourrir. Un espace minuscule mais que tu souhaitais intimiste comme mue par le désir d’accéder, le temps d’une visite, aux inaltérables profondeurs de cet Autre qui te faisait l’honneur de sa Présence et de son Ecoute.

 

Depuis mon éclatement, cet antre est devenu Pesanteur, Lourdeur, Purgatoire.

 

Tu m’accueilles d’un vif « Bonjour, mon chéri ! Tu as bien dormi ? ».

 

Malgré la vivacité avec laquelle tu prononces ces quelques mots, tout ton corps crie à l’imposture. Mâchoires tendues, mouvements saccadés, regard fuyant, main moite, pupille dilatée, respiration thoracique.

 

Ne comprends-tu pas que dans ces terribles moments d’une intimité qui n’est plus, je me sens encerclé par tes Peurs ? Je les hume comme si elles s’embrasaient tout autour de moi. J’en palpe chaque contour. Je peux en déterminer la profondeur, la texture, l’armature qui tels des fils barbelés délimite la zone à ne pas franchir. Cette même zone qui m’arrache inextricablement des lambeaux de peau et qui me renvoient à ce que tu penses voir de moi.

 

Dislocation. Désarticulation. Cassure. Inhospitalité.

 

Que suis-je réellement devenu à tes yeux ?

 

Difformité.

 

Ce « tu » qui m’était si cher et familier s’est mu en un « il » que ton écoeurement maintient à distance. Je suis toujours, dans ce regard implorant, dans ton discours voilé de demandes implicites, cet Autre que tu te refuses à mettre en terre.

 

Je ne suis plus le même, maman. Une partie de moi est morte le jour où cette scission s’est emparée de mon esprit.

 

Je suis mort.

 

Tu as désormais devant toi un autre Arthur.

 

Un Arthur qui vit, momentanément, dans son monde.

 

Momentanément.

 

Car malgré mon état, malgré une cognition qui s’affaiblit de jour en jour, je reste persuadé que j’intègrerai à nouveau le présent et recouvrirai mes facultés. Cette expérience fait partie de mon chemin de vie. Elle ne t’appartient nullement. Alors, pourquoi t’y affères-tu si férocement ? Que cherches-tu à satisfaire à travers une attitude qui se veut Présence mais qui se confond en Absences.

 

Que cherches-tu à rétablir ? Un ordre qui fait désormais partie d’un passé révolu ? Enterré ?

 

Je ne peux que sourire à ce terme « enterrer » car il s’agit bien de cela, au fond. Tu te refuses catégoriquement à mettre la dépouille en terre. Tu ne cesses de la déterrer. De tenter de raviver ce qu’elle était. De l’enjoindre implacablement à incarner ce qu’elle projetait : un jeune homme studieux, d’une douceur inégalée, promis à un bel avenir littéraire. Cette créature capable de lire jusqu’à trois livres par jour. Boulimique qu’il était de ces grands héros des lettres de noblesse.

 

912 jours.

 

Deux années et demie que cet harmonique s’égrène sur le même tempo faisant d’Inflexion une croisade où Injustice s’insurge contre l’affliction qu’elle s’éreinte à expurger. Ce même objet d’Idolâtrie qu’elle renie au lieu de l’embrasser, de l’accueillir, de l’enrober de l’amour qui était le sien quand Forme Humaine était plus acceptable, quand Esprit rimait avec Sagacité.

 

Ne vois-tu pas que ce qui est en jeu ici est de l’ordre de l’impalpable ?

 

Je crève de cette même Absence. De cette désertion du coeur.

 

Je crève de te voir, chaque jour, chaque minute, chaque seconde, dénier une réalité qui est pourtant tellement limpide.

 

Je crève de ton Rejet. De ton enfermement mental. De cette fuite qui t’englue dans l’abandon.

 

Démission. Renonciation.

 

Je crève des tourments qui m’assaillent et m’oppressent face à cette fureur aveugle qui t’anime. Qui te rend sourde. Myope et revêche face à ce qui est.

 

Ton abandon devient le mien.

 

Trahison.

 

Trahison d’une mère envers l’âpreté de la vie dont elle investit quotidiennement son fils.

 

Il n’est plus la chair de sa chair mais ce continuel défi envers la Vie. Une vie émaillée de pleurs, de doutes, d’aspérités, de ressentiments.

 

Ne vois-tu pas, maman, que ce manque de confiance en la vie se loge au plus profond de mes cellules ? Ne vois-tu pas que ce manteau-maladie recouvre chaque pore de ma peau ? Ne vois-tu pas qu’une chape d’indifférence est venue en coudre chaque morceau faisant de MOI, la chair de ta chair, un pauvre gueux ?

 

« Ca me révulse ! », t’entends-je vociférer au téléphone.

 

Tu sais, moi, ce qui me révulse ? C’est qu’en te trahissant toi-même, tu en sois venue à me trahir.

 

Ton fils, qui ne s’appelle plus Arthur mais Schizo et que tu ne reconnais plus qu’à travers ce qu’il est devenu.

 

Maladie.

 

 

Extrait du recueil Fragments d’histoires, de Marina TABEL

 

 

 

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Cette entrée a été publiée le 19/06/2019 par dans Fragments d'histoires, et est taguée , , .

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