Invisibilité

Lorsque nous portons peu de crédit à ce qui gît en nous, que nos désirs de création restent verrouillés dans l’antre de notre intériorité, que les différentes facettes qui nous constituent sont reléguées au second plan quand elles ne sont pas refoulées au fin fond de notre psyché, que nous avons force mal à dire, à partager ce qui est essentiel, vital pour nous, l’extérieur peut nous renvoyer cette désertion du coeur et de l’esprit et nous amener à nous sentir transparents, invisibles et à en souffrir.

Pourtant, ce qui nous constitue ne demande qu’à s’expandre, qu’à prendre concrétion dans la matière. Pour ce faire, cela exige d’apporter à ces parties qui nous constituent un vis-à-vis afin qu’elles puissent se dire. Attendre qu’une extériorité quelconque fasse ce pas pour nous revient à courir le risque d’hypothéquer une partie de sa vie dans cette interminable attente, celle d’être enfin vus, visibles et reconnus comme tels. La déception ne peut être qu’au rendez-vous.

Le sentiment d’invisibilité renvoie à notre propre capacité à pouvoir contempler et à pouvoir faire acte de présence, autrement dit, à l’attention, au regard que nous portons aux choses, personnes, situations, environnements qui nous entourent ; ceux que nous nous portons à nous-mêmes et à la qualité de cette attention.

Que voyons-nous au juste? Que prenons-nous le temps d’observer?

La qualité. Le temps dédié à l’observation. Voilà les variables. Car la vie ne cache rien. Elle montre tout. Il est donc rendu à chacun la possibilité de voir les trésors qu’elle recèle. Pour ce faire, il nous est demandé de nous mettre dans une certaine disposition d’esprit.

L’homme est à l’égal de la nature. En lui, gisent d’innombrables trésors que seul un oeil averti, celui qui se place dans cet espace de contemplation, peut entrevoir et saisir dans toute sa magnificence. Pour ce faire, cela demande une certaine forme de ralentissement et de patience, autrement dit, d’être dans l’accueil. Et lorsqu’un individu, quel qu’il soit, entre dans cet espace, c’est l’invisible qui s’offre à lui dans tout ce que cette sphère peut impliquer en termes de connaissance. Et lorsque pareil pas s’effectue, voilà ce qui en résulte : l’émerveillement ; la grâce ; un sentiment profond de se sentir liés à un ordre qui va au-delà de soi et qui apporte un sentiment d’enracinement sans commune mesure.

Nous sommes tous visibles. Tous. Peut-être qu’ici, ce qui nous donne ce sentiment d’être transparents est de ne pas “voir” ce qui gît en nous, toutes ces petites merveilles presque invisibles à l’oeil nu mais visibles face à un oeil aguerri.

Aussi, je vous invite à reconnaître en vous ces parties qui demandent à sortir de l’ombre, à pleinement exister, à projeter dans le monde extérieur vos désirs de création, vos envies, vos projets. A les nommer. A les faire parler. A les laisser s’exprimer. A ce moment-là, vous vous sentirez exister.

C’est cela donner corps à son être : le reconnaître sous sa multiplicité, sous ses formes diverses et variées, lesquelles peuvent créer des mouvements inédits. Le tout est de les laisser s’exprimer à leur juste niveau et de leur donner tout votre crédit.

Et pour vous, qu’en est-il? Vous arrive-t-il de vous sentir transparent(e), d’avoir le sentiment de ne pas exister aux yeux des autres? Qu’est-ce que vous gardez sous scellés et qui demande à sortir au grand jour?

On en parle? 😀

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